Témoignages d’anciens élèves sur l’école-mission des Pères Blancs

La brochure présente les résultats de l’enquête menée sur le terrain par Antoine de Léocour. C’est un texte précieux pour la connaissance du Niger et la formation d’une partie de ses élites. L’enquête a consisté essentiellement en dix entretiens avec d’anciens élèves de l’école-mission de Dogondoutchi. Ils ont fait l’objet d’une synthèse thématique commencée par Antoine en 2008 et finalisée en 2011 par Dominique Berlioz et Marie-Françoise Roy, membres de l’AECIN.

Ce qu’était l’école-mission

En 1941, le Père Constant Quillard, un missionnaire de la Congrégation des Rédemptoristes, arrive à Dogondoutchi : « Je goûtais une joie, une paix extraordinaire. Quelque chose me disait que ce serait le premier poste de mission, que je dresserais là ma première paillote ». Créée en 1947 par les Rédemptoristes, l’école-mission de Dogondoutchi est, aujourd’hui encore, réputée dans tout le Niger pour avoir contribué à former la première génération d’intellectuels et de cadres du pays. Contrairement aux écoles publiques dont les élèves étaient, au départ, les fils des chefs de village - ou des habitants des quartiers proches de ces écoles, la mission a recruté en brousse les enfants des villages environnants, sans distinction. Sans ce passage par l’école-mission, aucun d’entre eux n’aurait été à l’école. C’est l’école-mission qui leur a permis de réussir. Si la plupart ont embrassé une carrière d’enseignant, d’autres sont devenus journaliste, administrateur, sous-préfet ou maître de conférence à l’université.

Chacun insiste sur la chance immense et le pur hasard qui l’a amené dans cette école. Suscitant la curiosité des enfants et l’inquiétude des parents, les barbus, secondés par l’administration coloniale, ont recruté de force ces petits broussards, sans que les parents comprennent leurs objectifs. Beaucoup d’enfants ont fui, d’autres sont restés, s’adaptant tant bien que mal à leur nouvel environnement. Très vite, constatant la réussite des premières générations d’élèves, les parents, inquiets voire opposés au début, ont pris conscience de l’importance d’envoyer leur progéniture à l’école. De retour au village, les jeudis et aux périodes de vacances, les enfants des blancs, comme on les appelait, étaient choyés et bien souvent dispensés des travaux les plus rudes.

C’est avec émotion que les dix anciens élèves évoquent dans ces entretiens leur passage à l’école. La vie réglée de l’internat, l’adaptation parfois difficile à la vie en communauté, la discipline et la sévérité des enseignants, les bagarres entre copains, les sorties au marigot, la petite pièce que l’on a reçue de la famille et que l’on partage avec son camarade, le tourniquet, les parties de foot, les séances de cinéma, les repas de fête le dimanche, la catéchèse etc.… Bien plus que de simples camarades, les anciens élèves de l’école-mission entretiennent entre eux des liens fraternels. Aujourd’hui encore, n’importe quel observateur averti constatera la force du lien qui les unit.

C’est en se plongeant dans leurs récits de vie aussi passionnants qu’instructifs que l’on comprend pourquoi, aujourd’hui encore, Michel Hamma Issa, Jean Maïdabo, François Daoura Waho, Ousman Dan-Lélé, Joseph Seydou Allakaye, Luc Maïdagi, Marc Elo, Karimou Jean-Marie Ambouta, Maïno Bétou, Serge Guero Bida, et tous leurs camarades de l’école-mission conservent entre eux un lien de fraternité aussi fort.

Les thèmes de la brochure

La brochure, d’une trentaine de pages, traite les thèmes suivants :

  • les premiers contacts avec les Pères Blancs et le recrutement,
Le Père Sage rend visite au Baura Ganda Kassomou, 1954
  • l’arrivée à l’école,
  • les relations entre élèves,
  • la catéchèse,
  • le retour au village et les relations avec les camarades et la famille,
  • parcours scolaire, vie professionnelle, engagement personnel ,
  • questions autour de la religion et la culture,
  • l’avenir du Niger.

Elle se termine par dix fiches biographiques reprenant le parcours de chacune des personnes interrogées.

La brochure peut être téléchargée ici. Pour se procurer la brochure toute imprimée, voir ici.

Antoine de Léocour

Antoine a effectué un séjour solidaire avec Tarbiyya Tatali à Niamey et Dogondoutchi pendant l’été 2008, dans le cadre de son master 2 « Migrations internationales : conception de projets en coopération pour le développement » à Poitiers". C’est à cette occasion qu’il a recueilli les dix témoignages d’anciens élèves de l’Ecole-mission qui ont fourni la matière de la brochure.

Amoureux de l’Afrique, il est revenu travailler au Niger, indépendamment de notre association, dès l’automne 2008 comme employé d’ONG internationales. Il a continué à travailler dans l’humanitaire en Centrafrique.

Antoine est mort d’une balle dans la tête du côté de la frontière entre le Niger et le Mali le 8 janvier 2011, après avoir été enlevé la veille au soir en plein Niamey, au Maquis Le Toulousain par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Il avait 25 ans. Les circonstances de sa mort et de celle de son ami Vincent Delory, venu le rejoindre au Niger à l’occasion de son mariage, ne sont pas encore élucidées. On sait cependant que l’armée nigérienne a cherché à arrêter la progression du convoi des ravisseurs, et perdu trois de ses membres, Aboubacar Amankaye, Abdallah Aboubacar, et Abdou Alfari, et qu’il y a eu aussi une intervention des forces armées françaises.

Antoine de Léocour

A la mémoire de Vincent et Antoine

Une plaque à la mémoire de Vincent Delory et Antoine de Léocour a été inaugurée le vendredi 21 avril 2017 dans le Jardin de l’Intendant de l’Hôtel Nationale des Invalides à Paris,en présence de la secrétaire d’état chargée de l’Aide aux victimes, des deux familles et de quelques ami.e.s. On y lit

A la mémoire de Vincent Delory et Antoine de Léocour, victimes du terrorisme. Ils avaient 25 ans. Antoine et Vincent, amis d’enfance, ont été enlevés le 7 janvier 2011 à Niamey au Niger. Ils ont été tués le lendemain, 8 janvier 2011, au Mali lors de l’opération destinée à mettre fin à la prise d’otage. Nous ne les oublions pas.